« Les Russes arrivent » : quand la Russie montre ses muscles militaires, la Suède devient nerveuse.

« Les Russes arrivent » : quand la Russie montre ses muscles militaires, la Suède devient nerveuse.

"Les Russes arrivent" : quand la Russie montre ses muscles militaires, la Suède devient nerveuse.

Les discussions sur l’adhésion de la Suède à l’Otan ont également refait surface, comme c’est souvent le cas. Mais cette fois-ci, le débat a été davantage alimenté par l’insistance de la Russie pour que l’alliance militaire transatlantique n’accueille aucun nouveau membre, notamment l’Ukraine. Bien que le gouvernement dirigé par les socialistes ait récemment réitéré sa position de longue date selon laquelle la Suède doit rester « sans alliance », la plupart des Suédois estiment que l’adhésion à l’Otan devrait être une décision suédoise et non russe.   Lundi, la ministre suédoise des Affaires étrangères, Ann Linde, et son homologue finlandais, Pekka Haavisto, dont le pays n’est pas non plus membre de l’Otan, ont démontré ce point en rencontrant le secrétaire général de l’Alliance atlantique, Jens Stoltenberg, à Bruxelles pour un « dialogue » sur l' »approfondissement de leur partenariat ».   « Les Russes arrivent », une expression suédoise commune Les craintes de la Suède vis-à-vis de la Russie remontent à des centaines d’années, principalement en raison de plans d’expansion contradictoires sur ce qui est aujourd’hui la Finlande. La Russie a finalement gagné, volant à la Suède son statut de superpuissance européenne. Depuis, « Les Russes arrivent! » (Ryssen kommer) est devenue une expression suédoise commune.   Au plus fort de la Guerre froide dans les années 1980, et alors que l’Union soviétique et les États-Unis se pressaient pour devenir la première superpuissance nucléaire du monde, la proximité de la Suède avec la Russie, et l’observation de plusieurs sous-marins russes présumés dans l’archipel de Stockholm, avaient alors poussé les craintes à un paroxysme de fièvre chez les Suédois.   Malin Rising, une journaliste suédoise, a grandi dans la ville côtière de Nynäshamn (à 60 km au sud de Stockholm), et se souvient de ces tensions. « Je me rappelle comment mes amis et moi, nous grimpions sur les falaises et regardions au loin sur la Baltique pour voir si nous arrivions à repérer des sous-marins [russes]. C’était comme ça qu’on jouait à l’époque », explique-t-elle. « Je me souviens aussi des gens expliquant où trouver l’abri le plus proche au cas où les Russes arriveraient », poursuit-elle.   Plusieurs de ces abris ont depuis été convertis en centres de données, symboles de la perception changeante de la Suède des dangers représentés par la Russie.   En 2010, soit plus de vingt ans après la chute de l’Union soviétique et la fin de la Guerre froide, la peur suédoise des Russes s’est quelque peu dissipée, et le gouvernement décidait de supprimer le service militaire obligatoire, en place depuis 1901.   Mais à peine sept ans après, le pays réactivait la conscription militaire, invoquant l’annexion en 2014 de la péninsule ukrainienne de Crimée par la Russie et l’augmentation des activités militaires russes aux environs de la Suède. Le royaume décidait de rendre cette conscription mixte mais aussi de rétablir une garnison sur l’île de Gotland (en pleine mer Baltique, en face de Kaliningrad).   Qui contrôle Gotland possède un libre accès aux pays Baltes L’île de Gotland, et sa situation stratégique géographiquement en mer Baltique, est au cœur des peurs suédoises de la Russie. Elles se situe à seulement 300 kilomètres au nord de la base navale de Kaliningrad (territoire russe), et, à l’est, face aux trois pays Baltes (anciens pays soviétiques) que sont l’Estonie, la Lettonie et la Lituanie.   En d’autres termes : qui contrôle Gotland possède un libre accès aux pays Baltes.   Mais il y a plus que cela. Les trois pays sont membres de l’Otan, ce qui signifie que les autres membres – dont les États-Unis – seraient obligés de leur venir en aide en cas d‘attaque, en vertu de l’article 5 sur la défense collective.   « Pour aider leurs alliés, les États-Unis devraient envoyer des jets – rapides – et survoler la Baltique. Mais si les Russes prenaient le contrôle de Gotland, ils pourraient utiliser des missiles anti-aériens et des robots côtiers, ce qui rendrait très difficile pour les Américains l’accès et la défense de la Baltique « , explique Magnus Christiansson, chercheur en stratégie militaire à l’école supérieure de la défense nationale suédoise de Stockholm.   Magnus Christiansson explique également qu’une prise de contrôle russe des pays Baltes serait dévastatrice pour l’ordre mondial : « Cela écraserait totalement la crédibilité de l’Otan, il n’en resterait plus rien, étant donné qu’elle est construite sur la base de l’article 5, ‘Tous pour un, un pour tous’. Ce serait une catastrophe. »   Le chercheur ajoute que s’il s’était avéré que les Russes étaient réellement à l’origine des vols de drones signalés, il s’agirait très probablement d’une tentative d’intimidation envers les Suédois, rien d’autre. « Bien sûr, ils savent déjà où se trouvent les centrales, et tout le monde ne sait-il pas où se situe le palais royal  ?, plaisante-t-il. C’est juste un moyen un peu facile de déséquilibrer quelqu’un. C’est psychologique », conclut-il.   Le 18 janvier, les six navires de guerre amphibies russes ont quitté la mer Baltique. Mais les troupes suédoises sur Gotland, elles, sont restées en place.


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